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Maisà mesure que nous approchons de la fin, le danger de rester sourd aux révélations du Seigneur se fait plus précis, plus grave et plus lourd de conséquences. Au cours des siècles, la vérité a été à la fois permanente et progressive. Permanente parce que le dessein de Dieu pour le salut de l'homme est immuable, invariable. En progressive parce que, comme un éducateur
CHAPITRE3.NOUS AVONS TOUS LE DROIT DE CHERCHER LA VÉRITÉ. 4. Maintenant donc que nous, catholiques, nous imitons la conduite de Cyprien, étudions la doctrine émise dans son concile. Que dit Cyprien? «Vous venez d'entendre, bien-aimés frères, ce que notre collègue Jubaianus nous écrit, daignant nous consulter, malgré notre indignité, sur le baptême illicite et
Cedouble langage, nous l’avons déjà observé de nombreuses fois au Mée. Il mine le climat en rendant impossible tout débat de fond pour privilégier les oppositions de forme. C’est aussi pour cela que nous placerons notre action en 2018 en nous référant à cette phrase de Jean Jaurès « Le courage, c’est de chercher la vérité et
Avonsnous le devoir de faire le bonheur des autres. PHILO : L’état est-il l’ennemi de la liberté ? L’état est assimilable au gouvernement et à l’ensemble des structures par lesquelles il manifeste son autorité. Cette définition implique que l’état exerce une contrainte par le biais de ses institutions et de ses lois.
Javais considéré que ma réputation et mon statut étaient plus importants que la poursuite de la vérité, et j’avais vivement désiré accomplir mon devoir et travailler davantage. Tant que les frères et sœurs voyaient que je surveillais le travail et que je résolvais les problèmes, que j’étais une bonne dirigeante, capable de faire un travail pratique, tout le monde allait
Modele Premier Message Site De Rencontre. Donc la question "Avons-nous le devoir de chercher la vérité ?" tu peux l'aborder soit - sous l'angle religieux et métaphysique. Le devoir de l'Homme envers le divin. - sous l'angle de la connaissance, le devoir de l'Homme envers lui-même assouvir son besoin de compréhension et envers ses semblables contribuer à la recherche globale du savoir. -> Je suis d'accord, tout ça a à faire si l'on considère vérité comme absolue. Toutefois, nos connaissances sont aymptotes de cette vérité. On le la trouvera jamais vraiment/ Mais ce n'est sûrement pas "je mets un jean diesel pour m'intégrer à la société" ou sans caricaturer "je me plie à l'OPINON du plus grand nombre pour ne pas être rejeté". -> Ça, c'est si l'on considère dans le sujet le mot "vérité" comme étant relative. Donc mon sujet est juste si on considère dans l'énoncé le mot "vérité" comme étant relative. Mais alors, la vérité dans l'énoncé était absolue ou relative ? Comment peut-on savoir ? Les deux existent. Celle que l'on a étudier en classe est la relative. La différence idée vraie et absolue/opinion relative et fausse c'est un truc que tu as vu quand même. Bien sûr. J'ai bien compris. En gros pour toi si j'ai bien compris il y a un discours dominant, une pensée officielle, propres à chaque société. Et c'est ça la vérité, point barre. Dans le domaine de la justice par exemple tu ne fais aucune distinction entre le juste et le Juste. Si je fais la distinction entre les deux. Mais comment savoir dans l'énoncé si on parle de Vérité ou de vérité ?
BAC PHILO 2012 - Pendant quatre heures, les lycéens des filières L, S et ES ont planché ce lundi sur la traditionnelle épreuve de philosophie. REUTERS Que gagne-t-on en travaillant? LComment aborder le sujet? La notion du travail est une notion pratique. Et la tournure de la question va également dans ce sens. De prime abord, ce sujet était d'une grande accessibilité et permettait à tous les candidats de faire leurs preuves. Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? Pour répondre à la question posée, il fallait dans un premier temps énumérer les avantages matériels - comme le salaire, l'argent - que l'on tire du travail. Comment faire la différence? Mais toute la difficulté du sujet résidait dans l'évaluation de la valeur de ce gain. Au-delà du salaire, gagne-t-on en travaillant une satisfaction personnelle? De l'humanité? Dans des conditions convenables, le travail peut en effet nous aider à développer notre patience ou notre relation avec autrui. La notion de "gain" laissait également la possibilité d'aborder celle de concurrence. L'analyse du verbe "gagner" permettait de problématiser la question posée... et de récolter des points au passage! Offre limitée. 2 mois pour 1€ sans engagement >> Retrouvez tous les sujets de l'épreuve de philosophie du baccalauréat 2012 Toute croyance est-elle contraire à la raison? LComment aborder le sujet? L'opposition croyance/raison est un lieu commun en philosophie elle fait même parfois l'objet d'un cours pendant l'année de la Terminale. Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? Cette notion de croyance amène à une opposition simple quand on croit, on diminue l'usage de la raison. Il fallait peut-être aborder la notion de croyance religieuse. Et les excès regrettables qui en découlent. L'astuce? Etayer sa thèse notamment au regard de l'actualité - comme la violence résultant d'une croyance irrationnelle. Comment faire la différence? Les meilleures copies seront parvenues à cette conclusion certaines croyances, comme le fanatisme, sont contraires à la raison, mais d'autres sont compatibles avec la raison, voire rationnelles. Le scientifique par exemple prend des risques et parie que la raison peut marcher. La confiance envers les autres, notamment, ne peut pas toujours passer par le tamis de la raison on trouve quelqu'un de sympathique sans que la raison n'intervienne. En société, il peut donc être rationnel de se forcer à faire confiance à sa spontanéité car une relation sociale approfondie se fonde sur la confiance. Et de rappeler la thèse de Spinoza selon laquelle pour un homme raisonnable, il n'y a rien de mieux qu'un autre homme raisonnable. Une autre niveau de lecture était également envisageable. Celui de la foi en la raison qui se différencie de la croyance ordinaire par l'aptitude à douter d'elle-même sans renoncer à elle-même pour autant, d'être une recherche critique et lucide de la raison tout en restant confiante en la raison. Serions-nous plus libres sans Etat? SComment aborder le sujet? Ce sujet part d'un postulat simple et immédiat l'Etat exerce une domination sur nous qui limite notre liberté. Mais il fallait prêter attention à la nuance introduite par "plus libres" et non "libres", selon laquelle l'Etat n'est, par définition, pas tyrannique... Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? La formulation est en effet intéressante car elle implique que sous la domination de l'Etat en général - démocratie, Etat de droit... - on reste libre. Or, la liberté dans l'Etat passe nécessairement par la reconnaissance du droit, le "plus" de liberté reposant sur un progrès du droit pour tous et de ses droits pour chacun. Dans un premier temps, les lycéens pouvaient donc aborder la question d'une société sans Etat. C'est la formule chère aux anarchistes "Ni dieu, ni maître". Cet idéal politique consiste à instaurer une amitié sociale pure entre les hommes qui peuvent se passer de toute intervention étatique. Ce désir de se passer de l'Etat peut avoir un sens mais il faut mesurer sa réalisation pratique. Existe-t-il un risque de guerre de tous contre tous, comme le soulignait Hobbes? Ou les hommes seraient-ils au contraire en paix, comme l'avance Rousseau? Comment faire la différence? Plus qu'une société sans Etat, la question serait peut-être plutôt de mesurer la liberté sous le règne de l'Etat. Lorsque l'Etat est juste, on peut être libre. Et cette liberté n'est-elle pas meilleure que celle qu'on aurait sans Etat, au regard du comportement des hommes? Avons-nous le devoir de chercher la vérité? S Comment aborder le sujet? Ce sujet est moins attrayant car la notion de vérité n'est pas pratique, contrairement à celle de travail, par exemple, mentionnée plus tôt. Sur ce thème, on s'attend davantage à une question du type "Avons-nous le devoir de dire la vérité?" Or le sujet est plutôt nouveau. Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? Dans une courte partie, il fallait nécessairement aborder cette question du devoir de vérité. Mais il ne fallait pas trop s'y étendre et vite bifurquer sur le devoir de recherche de vérité... Comment faire la différence? L'exercice périlleux consistait donc à capter l'intérêt du sujet "Existerait-il un devoir de recherche de vérité?" La difficulté à dire la vérité n'est pas que celle-ci n'arrange pas toujours et qu'il est parfois préférable de mentir mais qu'elle est complexe à trouver. Il est extrêmement difficile d'atteindre la vérité et donc a fortiori de la chercher. Ainsi le vrai devoir de vérité est de chercher la vérité, comme c'est le cas en sciences, en philosophie ou même dans l'art. S'il existe, la particularité de ce devoir est de reposer sur une exigence propre de vérité alors même qu'on ignore encore ce qu'est cette vérité, puisqu'on doit la chercher. C'est comme une contradiction, mais une contradiction vivante et motrice, qui anime la recherche du vrai. Exigence de l'esprit et morale, désir de connaissance et devoir de raison à la fois. Le sujet permettait ainsi de traiter la culture en générale et les retombées de la recherche de la vérité dans la vie quotidienne. Enfin, les futurs bacheliers pouvaient peut-être mentionner les dialogues de Platon et finir leur copie en indiquant que la vérité est une recherche commune qui se trouve à deux. Travailler, est-ce seulement utile? ES Comment aborder le sujet? La notion de travail a du succès cette année! Cette fois, la question est plus abrupte car elle écourte le problème on admet d'emblée que le travail est utile. Et c'est normal, puisque le sujet est posé à des élèves de la filière ES. AttentionUne erreur s'est glissée dans l'intitulé du sujet... Les Tal ES ont planché sur "Travailler est-ce seulement être utile" et non "Travailler est-ce seulement utile. Pour retrouvez le "bon" corrigé de cette épreuve de philo, cliquez ici. Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? Pour ne pas passer à côté du sujet, il fallait donc identifier le rôle du travail en dehors de son utilité matérielle. Et faire preuve d'imagination... Car disserter sur l'utilité du travail aurait consisté à enfoncer des portes ouvertes. L'idée est de dire que le travail est en partie utile mais que sa nocivité - aliénation, esclavage... - l'emporte sur son utilité. Et de développer la critique du travail. Ce point de vue aurait été acceptable. Mais la majorité des candidats ont probablement choisi un axe plus mesuré le travail permet de gagner sa vie et, plus largement, il offre un accès à la vie sociale. Comme le soulignait Freud, quand on n'a pas de talent, le travail est une bonne discipline pour maîtriser ses pulsions. Et de démontrer ainsi que le travail est une souffrance qui permet de se développer soi-même le travail de l'artiste qui se met à l'oeuvre, le travail de l'enfantement.... Comment faire la différence? Pour aller plus loin, il fallait peut-être se poser la question des conditions politiques, culturelles et sociales qui permettent aux hommes de s'épanouir dans leur univers professionnel. Il aurait été bon de citer Karl Marx selon qui, dans une société idéale, un homme peut être pêcheur le matin, agriculteur l'après-midi et poète le soir. Le vrai travail pourrait donc être un travail libre dans une société bien organisée. Peut-il exister des désirs naturels? ES Comment aborder le sujet? Ce sujet est difficile de prime abord car l'opinion publique est persuadée que tous les désirs sont naturels. Il prend donc les esprits à rebrousse-poils! L'emploi du "peut-il" introduit ici une notion de rareté. Sur quoi ne fallait-il pas faire l'impasse? Le sujet invite à une réflexion critique sur le besoin naturel le besoin est-il vraiment un désir? Selon Claude Lévi-Strauss, le besoin est certes naturel mais il est enrôlé par la culture. Le besoin et donc a fortiori le désir ne sont peut-être pas naturels mais enracinés dans notre culture et dépendants des contraintes et coutumes propres à notre société. Les corrigés proposés ne sont que des indications succintes de traitements possibles, précise Martin Pham. Et d'autres traitements, différents ou mêmes opposés, seraient tout aussi envisageables. Le principal est d'avoir fourni une analyse personnelle, sensée et cohérente, du sujet qu'on a choisi, puisque la philosophie n'est autre que l'exercice rationnel de la liberté de penser par soi-même, avant tout. Comment faire la différence? Les meilleures copies auront abordé la manière dont on peut libérer le désir de ses déformations culturelles et sociales pour lui faire retrouver son sens. Et ainsi questionner la possibilité de réinstaurer un désir naturel par un effort de culture et de vérité. Un bon point aurait été, également, de faire un parallèle avec la société de consommation qui produit des désirs factices et fantasmatiques. Les corrigés proposés ne sont que des indications succintes de traitements possibles, précise Martin Pham. Et d'autres traitements, différents ou mêmes opposés, seraient tout aussi envisageables. Le principal est d'avoir fourni une analyse personnelle, sensée et cohérente, du sujet qu'on a choisi, puisque la philosophie n'est autre que l'exercice rationnel de la liberté de penser par soi-même, avant tout. Julie Saulnier Les plus lus OpinionsEditoAnne RosencherChroniquePar Gérald BronnerLa chronique d'Aurélien SaussayPar Aurélien Saussay, chercheur à la London School of Economics, économiste de l'environnement spécialiste des questions de transition énergétiqueChroniqueAbnousse Shalmani
Deux fois par mois, Le Devoir lance à des passionnés de philosophie et d’histoire des idées le défi de décrypter une question d’actualité à partir des thèses d’un auteur marquant. Alors, quoi ? ce livre, ce n’était que cela ? Ces êtres à qui on avait donné plus de son attention et de sa tendresse qu’aux gens de la vie, n’osant pas toujours avouer à quel point on les aimait […] ; ces gens pour qui on avait haleté et sangloté, on ne les verrait plus jamais, on ne saurait plus rien d’eux », écrit Marcel Proust dans Journées de lecture Folio, 2016, un essai publié en 1906. Je découvre cette phrase, aujourd’hui, alors que je viens tout juste de lire Morphine Folio, 2015, une nouvelle du médecin-écrivain russe Mikhaël Boulgakov, publiée en 1927. J’ai l’impression que Proust me comprend. Je viens d’accompagner pendant quelques heures, sur fond de révolution russe de 1917, le docteur Bomgard, qui se sent enfin libre après avoir quitté son poste de médecin de campagne pour pratiquer dans le chef-lieu du district, et le docteur Poliakov, son collègue morphinomane en détresse amoureuse. Ce dernier, déjà cruellement privé de sa femme, perd sa volonté et meurt de sa nouvelle dépendance à la drogue. Photo Le Devoir L’auteur Louis Cornellier est professeur au cégep de Joliette et chroniqueur au Devoir». J’ai été fasciné, ému, bouleversé par la lecture du journal de Poliakov, qui constitue le coeur de Morphine. La mort du médecin me trouble et me fait mal. Le livre se termine, et je me dis Alors, quoi ? ce livre, ce n’était que cela ? » Ces deux êtres qui sont entrés dans ma vie viennent d’en sortir, et c’est tout ? Je cherche, dans Morphine, du sens pour moi — que me dit cette histoire, de l’homme, de la société, de la vie ? —, le livre est fini, je suis seul et je cherche. Presque par hasard — les deux livres ont été réédités récemment dans la collection Folio 2 €— j’enchaîne avec Proust, et mon trouble trouve quelque lumière. Nous voudrions, écrit le romancier français, [que l’auteur] nous donnât des réponses, quand tout ce qu’il peut faire est de nous donner des désirs. » Proust ajoute que ce qui est le terme de leur sagesse [celle des bons livres] ne nous apparaît que comme le commencement de la nôtre, de sorte que c’est au moment où ils nous ont dit tout ce qu’ils pouvaient nous dire qu’ils font naître en nous le sentiment qu’ils ne nous ont encore rien dit ». La lecture serait-elle, comme la consommation de drogue, une activité grisante mais frustrante ? Le monde en nous Dans Journées de lecture, rédigé en guise de préface à un essai de l’écrivain britannique John Ruskin, Proust explore cette expérience. Il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré », écrit-il d’abord, confortant ainsi tous les grands lecteurs du monde dans leur conviction qu’ils n’ont pas erré. Proust confie ainsi que, dans sa jeunesse, il lisait sans cesse, dans sa chambre, au parc, partout. Ce que ces lectures d’enfance laissent surtout en nous, constate-t-il non sans surprise, c’est l’image des lieux et des jours où nous les avons faites ». Nous croyions nous être retirés du monde pour lire et nous découvrons, plus tard, que le monde est entré en nous plus fortement pendant que nous lisions. Quel lecteur, après réflexion, dira le contraire ? Je me souviens de moi, lisant une version pour enfants de La case de l’oncle Tom, le classique d’Harriet Beecher-Stowe, un livre qui m’a vacciné contre le racisme pour le reste de mes jours, assis dans la petite balançoire installée sous l’auvent de la voiture de ma mère, à Saint-Gabriel-de-Brandon ; j’ai des images de moi, jeune lecteur, l’été, couché à plat ventre sur le lit de ma petite chambre, pour dévorer Tom Sawyer, de Mark Twain, que j’ai reçu en prix d’excellence à la fin de ma 4e année du primaire, en plus d’un bâton et d’une balle de baseball. À l’adolescence, à la même place, dans la même position, je lirai Les Plouffe, de Roger Lemelin, que mon grand-père adoré m’a prêté. À 20 ans, étudiant en littérature, toujours au modeste premier étage de ma maison familiale, après une journée de travail estival à la pharmacie du coin, c’est L’âme désarmée, d’Allan Bloom, qui m’accompagne. Proust a raison les lectures de jeunesse font entrer le monde qui nous entoure en nous, avec les mots. Quand il présente la thèse de Ruskin, le romancier, qui n’a pas encore écrit À la recherche du temps perdu, poursuit son hymne à la lecture. Cette dernière, pour l’écrivain anglais, est, explique Proust, exactement une conversation avec des hommes beaucoup plus sages et plus intéressants que ceux que nous pouvons avoir l’occasion de connaître autour de nous ». Une pure merveille, donc. En contestant Ruskin sur un point, Proust va même plus loin. La notion de conversation », nuance-t-il, n’est peut-être pas la plus appropriée pour aller au coeur même de l’idée de lecture ». Nous pouvons, en effet, avoir des amis précieux et brillants avec qui converser. Toutefois, la différence principale entre un livre et un ami, ce n’est pas leur plus ou moins grande sagesse, mais la manière dont on communique avec eux, la lecture, au rebours de la conversation, consistant pour chacun de nous à recevoir communication d’une autre pensée, mais tout en restant seul, c’est-à -dire en continuant à jouir de la puissance intellectuelle qu’on a dans la solitude et que la conversation dissipe immédiatement, en continuant à pouvoir être inspiré, à rester en plein travail fécond de l’esprit sur lui-même ». Proust parle donc du miracle fécond d’une communication au sein de la solitude », tout en précisant, étonnamment, que cette grandeur de la lecture est aussi ce qui fixe son incomplétude et ce qui devrait nous faire prendre conscience du rôle à la fois essentiel et limité que la lecture peut jouer dans notre vie spirituelle ». Serait-elle donc une merveille nécessaire mais insuffisante ? Amitié et vérité La lecture, écrit Proust, est une amitié » qui s’adresse à un mort, à un absent », et cela fait son prix. Les livres, continue l’écrivain, n’exigent pas d’amabilité de notre part et permettent donc une amitié sincère ». Nous ne les fréquentons pas pour leur faire plaisir, mais parce que nous en avons envie ». Nous n’avons pas à nous demander, en les quittant, si nous avons bien agi avec eux en leur présence. Pendant la lecture, pas de faux-semblants. Nous ne rions de ce que dit Molière que dans la mesure exacte où nous le trouvons drôle, explique Proust ; quand il nous ennuie, nous n’avons pas peur d’avoir l’air ennuyé, et quand nous avons décidément assez d’être avec lui, nous le remettons à sa place aussi brusquement que s’il n’avait ni génie ni célébrité. » Cette expérience est précieuse, évidemment. Ces amis sont si attachants, si émouvants et si profonds qu’on ne peut qu’en venir à croire, à les fréquenter, qu’ils donneront réponse à toutes nos grandes questions, qu’ils nous révéleront la vérité. Or, on l’a vu plus tôt, cette attente ne peut qu’être déçue. J’ai lu Boulgakov, son médecin morphinomane m’a happé, bouleversé, alors, quoi » ? Il me laisse désemparé, avec plus de questions encore qu’avant, livré à ma solitude de lecteur poursuivant le Graal sans l’atteindre. Aurais-je mal choisi mon ami ? Pourtant, Maupassant, Tchekhov, Guillevic, Miron et les autres ont le même effet sur moi. Alors, quoi ? Dans le labyrinthe du sens Alors, explique Proust, il convient peut-être enfin d’accepter l’insuffisance de la lecture, c’est-à -dire de reconnaître que notre sagesse commence où celle de l’auteur finit », que la lecture est au seuil de la vie spirituelle ». Elle me donne l’impulsion nécessaire à ma quête de vérité, en me faisant rencontrer un grand esprit au sein de la solitude », mais elle ne saurait me donner, toute faite, cette vérité. Elle me rappelle sans cesse que je serais présomptueux de croire que je peux penser par moi-même de moi-même, tout en me disant que, si elle m’accompagne volontiers, ce n’est pas pour m’épargner l’épreuve solitaire du labyrinthe du sens. Je voudrais me reposer en elle ; elle m’offre une sagesse qui ne débouche que sur un élan et un pari. Tant que la lecture est pour nous l’initiatrice dont les clefs magiques nous ouvrent au fond de nous-mêmes la porte des demeures où nous n’aurions pas su pénétrer, son rôle dans notre vie est salutaire, explique Proust. Il devient dangereux au contraire quand, au lieu de nous éveiller à la vie personnelle de l’esprit, la lecture tend à se substituer à elle, quand la vérité ne nous apparaît plus comme un idéal que nous ne pouvons réaliser que par le progrès intime de notre pensée et par l’effort de notre coeur, mais comme une chose matérielle déposée entre les feuillets des livres comme un miel tout préparé par les autres et que nous n’avons qu’à prendre la peine d’atteindre sur les rayons des bibliothèques et de déguster ensuite passivement dans un parfait repos de corps et d’esprit. » Un livre, même le plus grand, le plus beau, le plus profond, n’est pas la vérité ni ne la contient. Il n’est que l’ange qui s’envole aussitôt qu’il a ouvert les portes du jardin céleste » et qui reçoit une dignité vraie des pensées [qu’il] éveille ». Le lecteur doit le savoir il n’y aura pas de passe-droit ; la lecture ouvre le lecteur à la vérité, mais ne la lui donne pas, le renvoyant plutôt à lui-même, transformé par l’expérience littéraire. J’écris cet essai parce que, depuis hier, l’ange de Proust s’en est allé, me laissant ainsi, au beau milieu du labyrinthe, avec quelques pensées de plus et le soin de trouver la voie. Quelque chose me dit que j’aurai besoin de quelques journées de lecture de plus. Des commentaires ? Écrivez à Robert Dutrisac. Pour lire ou relire les anciens textes du Devoir de philo. À voir en vidéo
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Elève prodige, Nietzsche obtient à 25 ans un poste à l’université alors qu’il n’a pas de thèse. C’est à cette époque qu’il rencontre Wagner. Il démissionne 10 ans plus tard pour vivre en nomade en Italie, France et Bohème, période de maturation de son oeuvre. La fin de sa vie verra une descente dans la folie, dont il ne reviendra pas. Après sa mort, sa sœur Elizabeth tenta d’utiliser sa pensée pour servir ses convictions nazie. Elle publiera des notes, allant jusqu’à en réécrire des parties. Ce sera l’ouvrage posthume La volonté de puissance. La vie ne tend pas au bonheur pour Nietzsche, qui critique en cela les philosophies eudémonistes classiques. C’est que la vie est pensée ici comme une énergie. Il s’agit d’une force vitale qui pousse tout être vivant, de la bactérie à la civilisation, à étendre son pouvoir sur ce qui l’entoure, à tenter de se l’approprier, l’assimiler, le digérer pour le soumettre à sa loi. Il n’y a ici rien de moral ou d’immoral, il s’agit juste d’un état de fait la vie est comme ça, elle est volonté de puissance »[1]. La vie est donc par nature Lire la suite → La tolérance est un concept daté, né au XVIème siècle avec l’édit de tolérance » de Catherine de Médicis, qui reconnaissait le droit de culte aux protestants. La notion est donc très liée, dès son essor, au contexte des guerres de religions entre catholiques et protestants qui divisaient alors le royaume. Comme émotion positive, ce qui nous intéresse ici, elle désigne un éventail d’attitudes allant de l’effort conscient pour accepter ce qu’on n’approuve pas, jusqu’à l’accueil bienveillant de la différence quelle qu’elle soit, traduisant ainsi une ouverture d’esprit, un respect d’autrui voire une curiosité pour sa particularité. Voltaire[1] en faisait une condition incontournable du développement moral des individus, et par suite, du progrès social. En effet, la tolérance est une des conditions d’un vivre-ensemble harmonieux. C’est aussi une condition de la démocratie, puisqu’elle suppose la reconnaissance d’une équivalence en droit et en dignité de toutes les opinions. Mais toutes les opinions doivent-elles vraiment être tolérées ? Ainsi, la tolérance n’est pas sans ambiguïtés. Notons d’abord que la tolérance n’est pas l’indifférence. Se moquer de tout ou considérer que tout est équivalent n’est pas être tolérant. Lire la suite → Je vous propose cette semaine une réflexion dans le prolongement de celle ouverte il y a quelques semaines par la machine de Nozick. On y avait vu que si, comme on a tendance à le croire, l’être humain recherchait par dessus tout à être heureux, alors toute personne devrait souhaiter se brancher à la machine. Or, l’expérience de pensée soumise à un grand nombre d’individus montre qu’au contraire, très peu de gens le ferait, indiquant par là que le bonheur n’est pas nécessairement pour eux la valeur suprême. Ce qui nous mène à la question philosophique de cette semaine faut-il préférer le bonheur à la vérité ? Implicitement, la question ne semble se poser que dans des situations où elles s’excluent l’une l’autre. Ce serait bonheur ou vérité, comme si on ne pouvait avoir les deux en même temps, comme si le bonheur ne pouvait que s’accompagner du mensonge et que la vérité ne pouvait que faire notre malheur. Dans une telle situation, on peut vouloir d’abord entendre le faut-il ?» comme un doit-on ?». Nous sommes alors renvoyés à la question des devoirs, comme si chacun d’entre nous, en toutes circonstances, avait le devoir de préférer l’un à l’autre. Doit-on donc préférer la vérité au bonheur, comme s’il y avait là un devoir envers soi-même, une dignité particulière ? Doit-on au contraire préférer le bonheur à la vérité, poussés par ce qui serait un respect envers notre nature, définie alors principalement sous son aspect jouissif ? La question des devoirs envers soi-même et des contenus de ces devoirs étant déjà philosophiquement problématique, c’est à grand peine qu’on fonderait ici un devoir prioritaire envers soi-même pour l’un ou pour l’autre, pour le bonheur ou pour la vérité. Se poser la question serait alors plutôt à entendre sur le mode du conseil, comme un vaut-il mieux choisir le bonheur contre la vérité ou la vérité contre le bonheur » ? Vous l’aurez compris, ce vaut-il mieux » ne peut faire l’économie du par rapport à quoi ? ». Par rapport à mes intérêts ? Sans doute est-ce la vérité qu’il faut alors privilégier. Par rapport à mon bien-être global ? Bien malin celui qui sait dès maintenant quelle alternative lui sera la plus heureuse au final. Une vérité douloureuse mais libératrice vaut peut-être mieux qu’une illusion confortable bercée trop longtemps. Eviter un malheur présent n’est peut-être pas un bon calcul à long terme. Difficile, donc, de se prononcer sur la meilleure des deux options d’un point de vue pragmatique, y compris par rapport au bonheur lui-même. Si bonheur et vérité semblent d’abord s’exclurent, ils peuvent aussi se rejoindre par-delà le malheur présent. On aboutirait alors à un bonheur par la vérité, comme s’il s’agissait d’un chemin détourné mais plus solide à long terme. Vous l’aurez compris, il n’y a pas de bonne réponse » à cette question, mais plutôt des choix et des implications. En choisissant la vérité au bonheur, je fais un choix sur la personne que je désire être. Ne pas mettre la tête dans le sable et choisir de faire face à une vérité désagréable est aussi une façon de s’assumer, d’assumer la vie avec ses dimensions déplaisantes et de se montrer responsable face au monde. On peut choisir la vérité, avec les souffrances qu’elle suppose, et en tirer, si ce n’est un bonheur en soi, au moins une certaine idée de soi-même. Se choisir responsable et malheureux plutôt qu’heureux dans l’illusion est aussi un choix rationnel qui engage l’être. Tout comme le choix inverse. En choisissant le bonheur à la vérité, j’indique que la dimension la plus importante de mon être est de jouir de la vie, quitte à en rester au niveau superficiel des choses et des relations, quitte à être un imbécile heureux ». Quitte aussi à mentir et faire souffrir ? Nous n’avons envisagé jusqu’ici que la vérité qui nous concernait, mais elle peut aussi mettre autrui en jeu. Préférer mon bonheur à la vérité pour autrui est ainsi courir le risque d’être injuste. Laisserais-je un innocent être accusé parce que c’est mieux pour moi de mentir ou de me taire ? Remarquez comment les pires dérives égoïstes peuvent découler de cette position. Et quand bonheur et vérité concernent autrui ? L’exemple le plus classique dire à une proche que sa ou son conjointe lela trompe. Quel est mon devoir prioritaire envers cette amie ? Lui dois-je d’abord le bonheur ou d’abord la vérité ? Je peux faire un choix qui engage la signification de l’être pour moi-même, mais c’est impossible de faire le choix de l’être pour autrui. C’est donc du côté de la relation elle-même qu’il faut alors chercher. On trouve chez Hegel l’idée que nous n’avons pas le devoir de tout dire à tout le monde, mais que les devoirs que nous avons les uns envers les autres dépendent de la nature et de la proximité de notre relation. Sans doute faut-il chercher là ce que je dois à autrui, et être conscient que ce que je déciderai alors de faire engagera la nature de notre relation. Et encore une fois un titre accrocheur, qui ne remplit pas ses promesses. Le bonheur par la raison » était-il donné en sous-titre, mais c’est très indirectement que l’on trouvera un quelconque rapport avec le bonheur en ces pages. C’est même à peine si on nous parle de Leibniz. Un titre plus honnête aurait été pourquoi le système de Spinoza, d’après M. Ferry, ne tient pas ». Cela dit, mis à part la déception que ressentira tout auditeur de ce CD qui espérait en apprendre sur le bonheur chez Leibniz et chez Spinoza, il restera pour les amateurs de philosophie, 1h15 de cours consacré à une certaine lecture de Spinoza plutôt agréable à écouter. Voilà a contrario, 3 CD qui tiennent leurs promesses, car c’est bien de bonheur et uniquement de bonheur que nous dissertons ici. Le premier CD est tenu par André Comte-Sponville, vous y retrouverez pour l’essentiel l’exposé qui avait fait l’objet d’un petit ouvrage Le bonheur désespérément. Le deuxième CD contient l’exposé de François Jullien, spécialiste de la pensée chinoise. Le troisième est consacré aux questions que s’adressent les deux invités. L’exposé d’André Comte-Sponville est très clair et pédagogique. Il soutient, en visitant entre autres Platon et Spinoza, que le bonheur risque fort de nous échapper tant que nous en faisons un but, et que notre chance de le retrouver est d’en faire non pas un but mais une expérience. L’exposé de François Jullien sera plus difficile d’accès si vous n’avez pas de bagage philosophique, mais il est particulièrement intéressant et vaut la peine que vous vous accrochiez un peu si besoin est. On y apprend notamment que la Chine n’a pas pensé le bonheur comme la pensée indo-européenne a pu le faire. La Chine n’a en effet pas construit d’opposition entre bonheur et malheur, elle n’a pas non plus élaboré de concepts d’âme, de corps ou de finalité, pas d’ontologie en Chine, pas de pensée de l’être, de pensée du manque ni de pensée de l’éternité. Toutes les questions fondamentales de la Grèce n’ont pas été pensées en Chine. C’est donc une vision tout à fait différente que François Jullien déroule sous nos yeux. On regrette de ne pas en apprendre plus et vous aurez sûrement, comme moi, l’envie de creuser la question. Le dernier CD est à réserver aux initiés, sautez-le sans regrets si vous vous sentez largué, le plus intéressant de l’enregistrement n’est pas là . Blaise Pascal 1623-1662 est à la fois mathématicien et moraliste. Comme mathématicien, il invente à 19 ans la pascaline » première machine à calculer, prouve la pression de l’air, invente le concept d’espérance en probabilités… Déjà rapproché de la religion chrétienne à la mort de son père, il connaît une nuit d’extase mystique le 23 novembre 1654. Dès lors, Pascal se consacre à une apologie de la religion chrétienne. Il est plus difficile de tirer une conception unifiée du bonheur chez Pascal, compte tenu du caractère fragmentaire et incomplet des Pensées. Ce qu’on peut remarquer cependant, au fil des extraits, est le caractère tragique que prend le bonheur chez Pascal. En effet, tout en disant que le bonheur est recherché par tout le monde, qu’il est le motif de toutes les actions de l’homme, jusqu’à ceux qui vont se pendre »[1], il affirme en même temps, de façon certes Lire la suite → Dès sa publication, l’expérience de pensée de Nozick a suscité de nombreux commentaires dans le monde académique. L’immense majorité des gens ne se brancheraient pas. D’abord, et c’est l’angle sous lequel la majorité des objections ont été apportées il semble que nous ayons une préférence naturelle » pour la vérité. La majorité des personnes interrogées faites l’expérience semble avoir une répugnance première pour un bonheur qui ne serait qu’illusion, même si nous n’avons pas conscience de l’illusion. Quelles explications pouvons-nous donner à cela ? Si je préfère le bonheur à la vérité, alors ce bonheur devient autocentré et stérile. Je suis heureux dans mon réservoir, certes, mais ce bonheur ne concerne que moi, ma vie ne laissera aucune trace dans le monde, je ne contribuerai au bonheur de personne ni au malheur de personne d’ailleurs, je ne participerai à aucune création, aucun débat, aucune avancée. Tout se fera sans moi. Si par contre je choisis de ne pas me brancher, alors certes ma vie ne sera pas aussi parfaite, mais elle aura un impact sur le monde. Je serai là pour mes proches, je peux changer les choses, bref, je serai en lien avec le monde et y serai un être humain responsable. C’est donc aussi entre une vie imparfaite et engagée ou une vie heureuse mais désengagée qu’on me propose de choisir. J’ajoute ici mon grain de sel au débat remarquez que l’expérience de pensée suppose qu’on vous offre la possibilité de vous brancher quand vous voulez. Ce qui signifie que le sujet est comme vous et moi, il n’a pas la connaissance de ce que sera effectivement sa vraie » vie future. Le choix est donc entre une vie heureuse à coup sûr et une vie qui reste encore à vivre et à écrire. Le choix n’est donc pas qu’entre bonheur et vérité, il est aussi entre bonheur maximal assuré et bonheur incertain mais qu’on espère pas trop mal quand même et qui surtout sera mon œuvre. Ma seule façon de me connaître, de savoir qui je suis et de quoi je suis capable, c’est de me coltiner au monde. Je risque de me faire broyer, certes, je risque le malheur, mais c’est la seule façon de répondre à la question qui suis-je ? ». Si je me branche, je ne le saurai jamais. Le choix est donc aussi entre bonheur absolu mais passif ou bonheur espéré et actif. Par conséquent, se brancher ou non signifie aussi choisir entre illusion et connaissance de soi. Au final, si le but de la vie était vraiment d’être heureux, si le bonheur, tel que nous le disaient les grecs, représentait effectivement le Souverain Bien, alors nous devrions tous choisir sans hésiter de nous brancher. Si la majorité des gens choisiraient de ne pas le faire, c’est peut-être là l’indice que le bonheur n’est finalement pas leur absolue priorité dans la vie. Certes nous le recherchons, mais peut-être pas à n’importe quel prix. Dès lors, chacun peut être renvoyé à l’examen de sa propre échelle de valeur et de son propre système de priorités quel prix serais-je prête à payer pour mon bonheur ? Vaut-il que je lui sacrifie ma liberté, ma responsabilité ou autres choses ? Quand devient-il trop cher payé ? Je vous laisse sur cette réflexion. J’aimerais pour cette semaine soumettre à votre réflexion une expérience de pensée très célèbre parmi les philosophes, issue d’un ouvrage du philosophe américain contemporain Robert Nozick Anarchy, State, and Utopia[1]. Supposez qu’il existe une machine à expérience qui soit en mesure de vous faire vivre n’importe quelle expérience que vous souhaitez. Des neuropsychologues excellant dans la duperie pourraient stimuler votre cerveau de telle sorte que vous croiriez et sentiriez que vous êtes en train d’écrire un grand roman, de vous lier d’amitié, ou de lire un livre intéressant. Tout ce temps-là , vous seriez en train de flotter dans un réservoir, des électrodes fixées à votre crâne. Faudrait-il que vous branchiez cette machine à vie, établissant d’avance un programme des expériences de votre existence ? » On vous propose donc de vous brancher à une machine, capable de vous faire vivre votre vie idéale. Tout ce que vous pourriez vouloir vous sera procuré, le bonheur est à portée de main. L’inconvénient est que tout cela sera faux, mais vous n’en saurez rien et pouvez choisir de ne jamais rien en savoir. Vous brancheriez-vous ? L’expérience de pensée de Nozick, 25 ans avant Matrix[2], vise bien sûr à nous mettre face à un dilemme. Faut-il préférer le bonheur à la vérité, ou la vérité au bonheur ? Remarquez qu’il ne s’agit pas d’opposer vérité et plaisirs, mais bien vérité et bonheur. En effet, la machine de Nozick n’est pas qu’une machine à plaisirs. Si ma conception du bonheur est une succession sans fin de plaisirs assouvis, alors je programmerai la machine en ce sens et elle me donnera ce que je souhaite. Si ma conception est différente, si je dose subtilement revers et succès pour me faire mieux apprécier les seconds, que je me fournis un appétit d’ogre pour la vie, que je programme la réalisation d’une grande œuvre ou quoi que ce soit d’autre qui correspond très exactement à mon idée de bonheur, alors la machine le donnera également. Et même, on peut admettre pour pousser l’expérience de pensée, que je n’ai pas besoin de programmer la machine à l’avance et qu’elle est capable de s’adapter en cours de route, voire de prévenir mes désirs pour me fournir ma vie idéale. C’est donc bien entre une certitude de bonheur maximal et une vie imparfaite, franchement malheureuse peut-être, mais vraie » que je peux choisir. Je vous laisse réfléchir à la question et aux enjeux que vous y voyez, car le choix ne se résume évidemment pas à une alternative entre bonheur et vérité. Je vous retrouve la semaine prochaine pour vous proposer un topo des débats que cette expérience a provoqué chez les philosophes de métier. [1] Nozick, R., Anarchy, state, and Utopia, New-York Basic Book, 1974, et en français Anarchie, Etat et Utopie, trad. E. d’Auzac de Larmartine & Dauzat, Paris, PUF, 1988, pp. 65-67 – Une expérience de pensée similaire se trouve chez Hilary Putman dans Raison, Vérité et Histoire 1981 [2] Matrix La Matrice au Qc et N-B est un film de Lana Wachowski 1999, dans lequel tous les humains ou presque vivent dans la Matrice, sorte de super machine de Nozick ». Un personnage Néo se voit offrir un choix entre deux pilules avec la bleue, il retourne dans la Matrice faire de beaux rêves, avec la rouge il en sort et vit sa vraie » vie. Ce petit opus est la transcription d’une conférence donnée en 1999 souvent reprise et suivie par une période de questions du public, elles aussi retranscrites. Dans un premier temps, Comte-Sponville s’interroge sur les raisons pour lesquelles nous sommes si peu ou si difficilement heureux. C’est qu’il semble y avoir, dans le bonheur lui-même, une contradiction logique. Tout homme désire être heureux. Or, la nature du désir semble nous condamner au tragique le désir est manque si bien que tout désir comblé disparaît bientôt comme désir ; ce qu’on vient d’obtenir ne nous intéresse déjà plus, l’ennui point. Ce que je désirais, et qui devait faire mon bonheur, déçoit ; le bonheur lui-même que je désire, lorsque je l’atteins, m’ennuie. Le bonheur, coincé entre les oscillations du désir et de l’ennui, n’est donc que fugacement entraperçu et au final, perpétuellement manqué. Ne peut-on désirer ce qu’on a, et donc être heureux ? Oui, répond Compte-Sponville, mais alors il faut ramener le bonheur du côté de la joie et du plaisir. L’erreur, quand on définit le désir comme manque, c’est de l’assimiler à l’espérance. Espérer, selon Compte-Sponville, revient à désirer sans savoir on ignore l’issue de notre espérance, sans pouvoir on n’espère que ce qui ne dépend pas de nous et sans jouir la jouissance est sans cesse ajournée. Or, tout le désir n’est pas espérance. Il suffit donc d’écarter, dans notre désir de bonheur ou dans notre désir vers le bonheur, tout ce qui relève de l’espérance. Ceci distingué, il est évident – et même souhaitable – qu’on peut désirer ce qu’on sait, ce qu’on peut, ce qu’on a, bref, ce qui dépend de nous, et que nous pouvons nous en réjouir. C’est donc par là qu’il y a un bonheur possible en actes. Le bonheur désespéré, c’est donc un bonheur qui enracine son désir dans le présent en s’étant débarrassé du tragique de l’espérance. Atteindre la souveraine félicité »[1], chez Descartes, demande de chercher en nous-mêmes. Les âmes vulgaires » se fourvoient en attendant le bonheur de biens extérieurs. Certes, les honneurs, les richesses ou la santé sont des biens, et les posséder favorise le bonheur. L’homme gâté par le sort peut bien être heureux. Mais parce que ces biens ne dépendent pas de nous, ce n’est qu’un bonheur en sursis. Ayant peut-être moins qu’un autre été Lire la suite →
avons nous le devoir de chercher la verite